L’élimination d’un paria politique est – presque – toujours accompagnée de photos ou vidéos
Comme à chaque fois ou presque, l’annonce de la mort ou de l’arrestation est suivi d’images du dictateur déchu. Saddam déterré, Saddam humilié, Saddam pendu. Gbagbo en liquette ou les Ceausescu gisant dans une mare de sang. Mouammar Khadafi n’y échappe pas. Quelques dizaines de minutes seulement après la notification de son décès par le Conseil national de transition lybien, plusieurs médias, dont l’AFP et Al-Jazira, ont diffusé photographies et vidéos de son cadavre ensanglanté mais a priori reconnaissable.
En mai dernier, le Temps avait interrogé André Gunthert, directeur du Laboratoire d’histoire visuelle contemporaine, à Paris, sur cette pratique consistant à exhiber les clichés du perdant. «C’est une très vieille façon de marquer sa victoire, une figure rhétorique obligatoire. A Rome, les chefs gaulois vaincus suivaient le cortège de l’empereur, attachés derrière le char. C’est une image forte. Quasiment tous les leaders arrêtés ou tués ont été pris en photo par leurs ennemis. On a vu les dictateurs, on a vu le Che… Seul Hitler, jusque-là, faisait exception […] et cela a alimenté les rumeurs conspirationnistes pendant des années. Il est important d’avoir la preuve visuelle de la défaite de l’ennemi», arguait-il. Tellement important ou désirable que certains ont fabriqué un photomontage lors de l’élimination d’Oussama Ben Laden, mêlant son visage à celui d’un anonyme défiguré. Pour l’heure, les images de Mouammar Kadhafi n’ont pas été formellement authentifiées mais elles circulent déjà largement sur Internet. «Il s’agit apparemment d’une capture d’écran de vidéo, prise par un rebelle libyen», selon un photographe de l’AFP.